Pourquoi avoir choisit le Père Lachaise ? Et Louise Ebel comme modèle ?
Tous deux sont magiques. Le cimetière est un endroit qui dégage quelque chose de mystérieux, tout comme Louise. En leur présence, on oscille entre le Passé et le Présent, on ne sait plus vraiment à quelle époque on se situe exactement.
Comment s’est déroulé ce « shooting » ?
Il était plutôt improvisé. Je suis allé acheté des cotillons et nous sommes partis faire la fête au cimetière de façon très naturelle. Il faisait froid, ce fut une vraie épreuve pour Louise (l’Hiver, je torture souvent mes modèles). C’était irrévérencieux mais pas méchant, nous avons beaucoup ri. Nous avions l’impression de traverser le cimetière comme si nous finissions une soirée arrosée, marchant légèrement entre les tombes au petit matin. C’était presque décadent.
Quels sont les contraintes et les avantages de ce lieu ?
Les pavés taquinaient les talons de Louise. Il est assez impossible de faire un défilé dans les allées du cimetière à cause de ça. Le shooting ressemblait parfois à une excursion d’escalade. L’avantage du Père Lachaise est sa beauté intemporelle. L’inconvénient est sa popularité, car il en est victime. On croise souvent trop de monde dans les allées. Cela n’empêche pas simplement les photographies, mais aussi de ressentir des choses fortes qui n’appartiennent qu’à la solitude.
Y-a-t-il d’autres lieux ou cimetières propres à Paris qui vous inspire de la même manière ?
Non, cela n’existe pas. En Pologne peut-être, si vous allez dans les cimetières juifs. Pour ce qui est de Paris, Louise connaît encore mieux que moi les lieux sans âge qui ont un lien fort avec le XIXe siècle, il suffit d’aller voir son blog Pandora.
Je ne peux pas m’empêcher de faire le rapprochement avec Ödland. Dans les deux projets, on y retrouve du naturel et de la délicatesse et on est attiré par tout ça. Est-ce que la sensibilité est votre fil rouge ?
Je suis convaincu que si on ne fait pas les choses avec sensibilité et un peu d’humour, il vaut mieux se casser un talon aiguille. J’essaye de garder ce même esprit dans chacun de mes travaux. Je suis aussi très inspiré par le XIXe siècle, c’est pourquoi le groupe Ödland que je dirige me procure beaucoup de bonheur. Les personnes qui le constituent apportent aussi beaucoup de leur sensibilité et de leur talent. D’un autre côté, le travail artistique de Louise fait souvent appel aux mêmes références que ma musique, c’est pourquoi cette collaboration semblait évidente. Il y en aura d’autres d’ailleurs.
J’ai lu aussi que vous vous inspiriez beaucoup du XIX ème siècle ? Qu’est ce qui vous séduit dans cette période ?
Avant tout, le charme d’une société qui découvre la révolution industrielle mais qui n’est pas encore prête à l’accepter dans sa forme la plus laide. Le mal du siècle et le surplus de décorations utilisé pour combler ce malaise me touchent personnellement. Beaucoup d’artistes de cette époque se sentaient en décalage avec leur temps, dégoûtés par la modernité. Et c’est quelque chose que l’on peut encore ressentir aujourd’hui ! La fascination pour la Nature à l’état sauvage, pour la Science, et le voile de mystère et d’élégance qui englobe cette période me la font réellement aimer.
Propos recueillis par Esther Trousset, pour la deuxième édition du magazine SENS 7.
Très beau.
Votre réponse à la dernière question est réellement pertinente, vous touchez juste.